Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Décroissance Ile de France
5 décembre 2020

NE CONFONDONS PAS LES ANTIPRODUCTIVISMES DE GAUCHE DE CEUX D’EXTREME DROITE



Par Thierry Brugvin
Sociologue, co-auteur de « 6 chemins vers la décroissance », Ed. Du Croquant, 2018.

Introduction
Dans son livre, « la critique du productivisme », publié aux éditions Noir et Rouge en 2016, Philippe Pelletier fait aussi la critique des créateurs de l’antiproductivisme, de même que dans son article intitulé « les origines fâcheuses de l’antiproductivisme », dans la revue les Zindignés d’avril 2016. La rédaction de cette dernière est majoritairement décroissante et antiproductiviste. Ainsi, après avoir fait preuve d’ouverture d’esprit en publiant cet article, elle a néanmoins estimé qu’une clarification était utile, afin d’éviter les amalgames entre les courants des fascismes, des antiproductivismes, des écologistes et des décroissants. En juin 2016, le hasard a fait que j’ai eu avec lui une discussion dans une ambiance sympathique au sujet de son livre et de cet article.
C’est pourquoi, nous nous interrogerons sur le sens de l’antiproductivisme et de son contraire le productivisme. De plus, l’écologie est parcourue par de grandes tendances parfois opposées, telle l’écologie politique contre l’écologie environnementaliste, la défense de la modernité (la liberté, la raison…) contre le conservatisme, le traditionalisme, l’ordre naturel. En effet, les tendances politiques de l’écologie et des courants décroissants sont multiples, comme celles de l’antiproductivisme.

L’idée antiproductivisme ne se limite pas à ses origines historiques. Le concept d’antiproductivisme a été créé par « l’Ordre nouveau » (1930-1939), un groupe que Philippe Pelletier considère comme proche du fascisme et qu’il l’est peut-être bien. « L’Ordre nouveau » s’est édifié sur trois principes : « a) le personnalisme : primauté de l’individu sur la société, b) communiste antiproductiviste, c) régionalisme terrien, racial et culturel » (1). L’usage du terme racial peut en effet le rapprocher du fascisme, même si ce n’est pas très aisé, à démontrer du premier coup d’œil, puisque son idéologie se réclame du communisme antiproductivisme. Or, le communisme qui défend la propriété publique des moyens de production. Il est donc profondément opposé au fascisme qui dans les faits n’a jamais remis en cause la propriété privée capitaliste. Or, le fascisme dans la pratique (pas toujours dans le discours) est un capitalisme autoritaire. Nous définissons le fascisme comme une économie fondée économiquement sur la propriété privée des moyens de production, dans le cadre d’une économie de marché (plus ou moins libéral, selon les tendances) et politiquement par un gouvernement autoritaire (anti-libéral au plan de la démocratie politique).
Mais, admettons que l’Ordre nouveau fut bien un groupe fascisant, car le but de cet article ne consiste pas à tenter de démontrer le contraire, mais à montrer qu’il peut y avoir des antiproductivismes fascistes, des antiproductivismes communistes, décroissants, socialistes.

Qu’est-ce l’antiproductivisme ? Il peut être défini comme « un système d'organisation de la vie économique dans lequel la production est donnée comme objectif premier » selon Alain Rey. Le productivisme est donc l’objectif, la valeur prioritaire d’une idéologie. Philippe Pelletier estime que dans un second sens « le productivisme « renvoie à un système économique caractérisé par une production très intensive, en particulier l’agriculture qui utilise toutes sortes d’intrants chimiques ». Cependant, il estime que la première définition est « un sérieux non-sens », car le capitalisme ne produit pas pour produire, mais pour vendre ». Cela renvoie donc à la définition du capitalisme. Mais aussi à celle du socialisme et du communisme, qui ont été aussi productivistes par le passé, afin de créer une richesse suffisante, pour être en mesure de la redistribuer, de satisfaire les besoins et l’emploi de leur peuple. Tandis que le capitalisme produit dans le but d’accroître le taux de profits des propriétaires des moyens de production, d’accumuler le maximum de richesse et finalement le maximum de pouvoir.


Dans ces trois courants politiques, le productivisme et la croissance ne sont pas un but, mais une fin. Cependant, avec le temps, la fin et le but tendent parfois à se confondre. C’est une des critiques des partisans de l’anti-technologie, tel Jacques Ellul, qui estime que les structures technologiques, qui sont des moyens prennent le pas sur les fins et engendre une inversion entre les fins et les moyens. Selon qu’on définira le capitalisme comme relevant principalement de l’accumulation, du profit, du marché, du productivisme, de la propriété privée des moyens de production…), alors, le programme anti-capitaliste différera. Il pourra se limiter à l’antiproductivisme contre le productivisme, à la propriété collective contre la propriété privée, la redistribution contre l’accumulation, etc. ou combiner certaines de ces dimensions, voire toutes.


Etant donné que le productivisme peut être capitaliste, mais aussi socialiste et communiste, l’antiproductivisme n’est pas spécifiquement capitaliste. L’écosocialisme pour être véritablement anti-capitaliste, ne doit donc pas être seulement antiproductiviste, mais avant tout passer à une propriété collective des moyens de production par des coopératives et des entreprises publiques. C’est le premier pilier de la démocratie économique, puis politique.
Une méthode véritablement scientifique consiste à montrer les liens entre l’histoire des hommes, des partis et des idées. Puis, ensuite à différencier ce qui relève du conjoncturel (les alliances passagères) par rapport au structurel (les liens logiques entre les idées). Sans cette différenciation, on confond les hasards des rencontres, avec les structures des idées. C'est-à-dire que les hommes et les groupes qui ont créé le concept d’antiproductivisme, même s’ils étaient de droite ou d’extrême droite, ne peuvent s’approprier un concept. Bien qu’on puisse retirer des enseignements sur le sens profond d’une idée, tels la nature, l’écologie, le productivisme, en étudiant l’histoire des hommes qui les ont crée, on ne peut assimiler les idées politiques de ces hommes à ces concepts. Ainsi, l’idée de l’antiproductivisme peut être repris, par des groupes de gauche et d’extrême gauche et s’articuler de manière cohérente et logique avec leurs idées, telles l’égalité, la solidarité, etc. Sans différencier dans un deuxième temps les idées et les hommes, cela engendre du confusionnisme nuisible à recherche scientifique de la vérité. Ainsi, le terme écologie a été inventé par Ernst Haeckel, un biologiste allemand proche de l’idéologie nazie. Ce n’est pas pour autant que tous les écologistes sont des fascistes. De même, si un chercheur nazi avait inventé l’électricité ou le téléphone faudrait les partisans de gauche devraient-ils s’interdire de l’utiliser ? De nombreuses inventions techniques et de nombreuses idées dépassent le clivage économique droite - gauche (liberté contre égalité économique), de même que l’opposition entre politique autoritariste  et démocratie (ordre politique - liberté politique). Ces idées ne peuvent donc être assimilées à un seul camp.


Historiquement, Rougemont et certains des membres de son groupe, l’ordre nouveau sont les créateurs du concept d’antiproductivisme et étaient proches des fascistes à l’époque. Philippe Pelletier estime donc que les antiproductivistes qui ne remettent pas en cause le capitalisme vert l’aident finalement à perdurer. Sur ce point, il n’a pas tort, car une critique de l’écologie ne remettant pas en cause le capitalisme ne sera pas suffisante pour protéger l’environnement. Mais il faut aller au bout du raisonnement et remettre en cause aussi le productivisme communiste ou socialiste. Ce que Philippe Pelletier ne fait pas véritablement.
De plus, Il sait que les décroissants notamment sont antiproductivistes. Or, il laisse entendre de manière plus ou moins directe, qu’actuellement, les personnes et les mouvements qui se réclament de l’antiproductivisme, font au mieux involontairement le jeu du capitalisme d’extrême droite et que ce sont au pire des fascistes qui s’ignorent, voire qui cachent leur idéologie véritable. Or, une telle analyse ferait preuve de confusionnisme volontaire. A la différence du confusionnisme involontaire, qui tend à se lier involontairement aux idées d’un parti envers qui on s’oppose. Par exemple le Front National, qui est un parti contre le TAFTA, pour la relocalisation, contre les abus des transnationales et contre la finance dérégulée… Or, il existe plusieurs courants politiques écologiques, comme il y a plusieurs antiproductivismes et plusieurs productivismes.


Les principales oppositions au sein des courants de l’écologie politique sont les suivants :
L’écologie anti-croissance (la décroissance) et antiproductiviste, contre l’écologie productiviste et pro-croissance (une croissance économique régulée par des taxes et normes environnementales).
L’environnementalisme (la seule défense de l’environnement), qui se veut apolitique, a-économique, contre l’écologie politique (critiques anti-capitalistes, anti-communistes de l’économie), qui estime qu’on ne peut échapper aux clivages politiques, car tout est politique ;
La nature (l’écocentrisme, c'est-à-dire l’homme resitué au même niveau que le végétal, l’animal et avec les mêmes droits) contre l’humanisme (l’anthropocentrisme, l’homme avant la nature et au-dessus d’elle) ;
La nature (l’essence naturelle des humains (l’essentialisme)), contre la culture (la liberté des idées, des modes de vie, du genre, des orientations sexuelles…) ;
L’ordre (l’ordre naturel, l’autorité traditionnelle) contre la liberté (la créativité, l’innovation),
La tradition (l’ordre traditionnel et naturel, le dogme religieux), contre la modernité (la raison, l’individualisme, le libéralisme…) ;
Les conservateurs (les réactionnaires, l’expérience de la tradition, du passé) contre le progrès (technologique, scientiste et ses incertitudes liées à la nouveauté…) ;
Les opposants à la technologie, tels Ellul, contre les partisans de la solution technologique aux problèmes écologiques ;
L’écologie de l’intériorité (l’écopsychologie, l’écologie spiritualiste, l’expérience vécue de la nature et des  paysages, par l’intuition, par le ressenti (tels les sentiments, les ambiances, les impressions), par les sensations corporelles, par la perception visuelle, auditive, olfactive), contre une approche de l’écologie scientifique matérialiste (des experts, des statistiques, de la mesure, de la rationalité) ;
Le local (tels la terre, le patrimoine, la région, l’identité locale, l’identité culturelle, la relocalisation), contre le global (la terre est unique, le climat est global).
Ces différences principes contradictoires structurent aussi les sous groupes des écologistes et des décroissants. Ces derniers ne forment pas un seul bloc, mais sont très diversifiés. Il y a notamment la décroissance pour l’environnement (décroissance environnementale), la décroissance pour la climat (décroissance climatique), décroissance contre la fin des ressources non renouvelables, la décroissance pour la justice sociale et la décroissance anti-capitaliste, la décroissance écosocialiste, la décroissance écocommuniste. Vers le centre, il y a la décroissance anarcho-primitiviste. Vers la droite, vers le capitalisme libéral, il y a la décroissance capitaliste néolibérale. A l’extrême droite, la décroissance anarcho-capitaliste, (libertarienne = la liberté économique et politique) et la décroissance écofasciste (l’ordre politique, social et la liberté économique).

L’écologie est naturellement proche de l’ordre naturel. Le terme idéologie peut être défini comme la structuration hiérarchisée d’idées et de valeurs ; ce n’est donc pas péjoratif. L’idéologie écologiste, la culture écologiste part d’une analyse et de valeurs prioritairement liées aux lois de la nature, à l’ordre naturel du monde minéral, végétal et animal. La philosophe Sylvie Dauriach explique que pour le biologiste Ernst Haeckel fondateur du terme écologie, « les termes d’ordre, de régularité, d’harmonie, de symétrie, d’équilibre sont récurrents. La nature est ’’ bon ordre ’’, harmonie. Elle est par excellence le lieu de la beauté » (2006). C’est pourquoi l’écologie a donc au départ une orientation préférentielle vers le pôle de l’ordre, au sein de la structure triangulaire (liberté, égalité, ordre) des politiques économiques. Or, les valeurs de l’ordre sont souvent proches de l’autorité, des régimes autoritaires, du dogme, de la tradition. A l’inverse, la notion de croissance est proche de l’idée de progrès, qui est opposée à celles de stabilité, de conservatisme, de circularité, de non-évolution, de limitation.


 « La ’’ Révolution Conservatrice ’’ est un courant de pensée, avant tout culturel, qui s’est développé en Allemagne après 1918 en opposition à la République de Weimar et qui se caractérisait par un refus de la démocratie et du parlementarisme. Leur Weltanschauung, leur ’’ vision du monde ’’, révolutionnaire - conservatrice se réclamait de l’idéalisme, du spiritualisme voire du vitalisme, et se proposait de reconstituer une société sur la base de communautés naturelles structurées et hiérarchisées, menées par une nouvelle aristocratie du mérite et de l’action » (2) . Cette définition est juste historiquement, cependant au plan philosophique, donc à un niveau plus général, les idées conservatrices mettent en avant le respect de la tradition (car ces valeurs et pratiques ont fait leur preuve durant de longues périodes passées) et s’opposent donc à l’innovation, au progrès. Le conservatisme défend donc aussi l’ordre (la stabilité, la structure), contre le désordre généré par l’excès de liberté, pouvant engendrer l’anomie (la perte des normes et des repères) générant le chaos social et psychologique. Les courants de l’écologie qu’ils soient de droite ou de gauche peuvent donc facilement être tentés de défendre des tendances traditionalistes et conservatrices, donc de suivre la pente des courants conservateurs. A la différence de la plupart de l’extrême droite libertarienne qui refuse majoritairement l’ordre (des institutions, de l’Etat) et l’égalité, au nom de la liberté. Cette attirance pour l’attitude conservatrice apparaît de manière la plus marquée à l’extrême droite autoritaire, puisqu’elle est majoritairement fondée sur l’ordre social et politique, le respect des valeurs traditionnelles. Cette dernière défend l’ordre traditionnel, qui était autrefois celui du royalisme, puis de la hiérarchie de l’Etat capitaliste qu’il soit fasciste ou libéral.
 
L’ordre naturel de l’écologie peut s’exercer contre la liberté de la raison. L’autre risque de l’écologie consiste à défendre l’ordre naturel traditionnel contre la modernité (la liberté politique, la liberté des idées, la raison, l’humanisme…). La modernité à certaines vertus, mais comme tout principe, il devient excessif lorsqu’il n’est pas rééquilibré par son contraire. Ainsi, l’hypermodernité, génère la volonté d’exercer sa liberté et sa connaissance sans limite, jusqu’aux développements technologiques des transhumanistes, de la géoingénieurie, de l’homme cyborg.
Chercher dans la technologie des solutions pour régler le problème du climat conduit donc à guérir le mal par le mal. Cela fonctionne parfois, cependant, c’est très risqué à l’instar de celle de l’apprenti sorcier… C’est pourquoi l’usage l’excès de liberté d’user de sa raison, la liberté de créer des objets dangereux au plan biologique (biotechnologie, OGM, transformation de l’ADN…), chimique (pesticide, engrais), physique (nucléaire, nanotechnologie…) doit être rééquilibrer grâce à la promotion de principes opposés, tel celui de l’ordre collectif et de l’égalité. C'est-à-dire la possibilité de décider de manière collective et démocratique de la légitimité des créations technologiques qui mettent potentiellement danger la pérennité de l’humanité. Le principe d’harmonisation des conflits permet justement de trouver une dialectique dynamique et donc équilibrée entre le triangle liberté, ordre, égalité.
Parallèlement à l’accroissement de la démocratisation de la science et de l’industrie technologique, certains courants écologistes cherchent à limiter l’usage de la technique. Les plus radicaux souhaitent revenir à l’époque précédant l’ère industrielle. Par exemple en se limitant à l’usage de la charrette en bois, comme le font les communautés quakers aux Etats Unis. Les anarcho-primitivistes vont plus loin encore en prônant le retour au mode de vie paléolithique des chasseurs cueilleurs ! Mais bien peu, joignent le geste à la parole à long terme. Entre le refus total de la technologie et l’hyper-technologisme, les pratiques plus modérées, plus proche du juste milieu visent à freiner l’usage et l’emballement technologique, à limiter la dépendance face à l’électronique, à l’informatique, aux NTIC (nouvelles technologies de l’information et de la communication) et à développer plutôt des technologies appropriées et maîtrisées.

L’équilibre entre la part de l’ordre et de la liberté limite leurs excès. En effet, l’ordre comme la liberté peuvent être constructif ou destructif du point de vu de l’intérêt collectif. La protection de l’environnement suppose le respect des cycles de la nature, des lois de la biologie et des écosystèmes, donc de l’ordre naturel du vivant. De même, la mise en œuvre de la démocratie suppose la création de lois démocratiques, donc d’un ordre collectif décidé par tous, d’une autorité légitime. Cependant, l’ordre peut devenir autoritaire, tyrannique puis dictatorial, tel l’écofascisme.
De même, la liberté de la modernité permet la liberté politique, la liberté de conscience (la raison, la science…), la liberté individuelle, l’humanisme… Cependant, l’excès de liberté engendre la liberté du plus fort du néolibéralisme et de l’anarcho-capitaliste, la liberté du scientifique apprenti-sorcier. Telle celle des transhumanistes qui peut faire de l’être humain un homme-machine ou la liberté technologique sans limite de la géoingénieurie qui pour réguler le climat peut générer de plus grandes catastrophes écologiques encore. Dans le cadre de la technologie transhumaniste, seuls les plus riches peuvent se soigner grâce aux technologies de pointe. Or, l’alliance homme-machine du transhumanisme peut conduire à dénaturer l’humanité dans sa capacité de libre arbitre, sa sensibilité, ses sentiments… Car c’est bien la capacité à ressentir qui manque aux machines et aux métaux. Voilà donc certains des excès de la vision réductionniste du matérialisme scientifique et technique, qui se situent dans le pôle de la liberté de la raison.
Pour d’autres, tels les partisans de l’écologie de la postmodernité, la solution réside donc dans la recherche de l’équilibre entre les excès de « l’hyperliberté », de l’hypermodernité, de l’ordre conservateur, de l’ordre traditionaliste et de l’ordre autoritariste. Il s’agit donc de défendre et développer la liberté individuelle, la liberté démocratique, la liberté scientifique tout en veillant, grâce à la démocratie politique, économique et scientifique, à respecter les cycles naturels, les lois du vivant et des écosystèmes environnementaux, c'est-à-dire l’ordre naturel écologique. Ils cherchent donc à promouvoir une liberté respectueuse de l’ordre collectif et naturel, donc aussi de l’égalité économique. Or, les trois principes liberté, égalité, ordre sont à la fois complémentaires et opposés, dans le cadre d’une dialectique dynamique.
Les idéologies écologiques, même si elles s’intéressent logiquement au respect de l’ordre de la nature peuvent très bien s’articuler avec la plupart des courants politiques. Même si certains sont a priori moins proches de l’écologie, en termes de valeurs, comme les courants politiques fondés prioritairement sur la liberté. C’est le cas du capitalisme libéral ou du socialisme libertaire et plus encore de l’anarcho-capitalisme des libertariens, qui refuse non seulement l’Etat, mais même la fédération à la différence de la majorité des libertaires. Ainsi, les écosocialismes libertaires réunissent les valeurs de l’écologie avec celles de la liberté démocratique et de l’égalité économique.

Quel est le positionnement politique de Philippe Pelletier ? Ce dernier semble se situer entre l’écocommuniste libertaire et l’écosocialisme libertaire. Ces deux courants politiques dénonçant l’Etat et le capitalisme. Sur le plan de ses idées écologiques, il n’est pas productiviste. Cependant, personne ou presque ne se qualifie de productiviste, même pas les capitalistes. Étant donné qu’il critique l’antiproductivisme et ses auteurs, il ne semble donc pas non plus être un fervent adepte de l’objection de croissance. A l’inverse, des écologistes antiproductivistes sont généralement décroissants, ou au moins des objecteurs de croissance (ces derniers estiment que la croissance n’est pas la solution). Les décroissantes pro-solidarités expliquent qu’au minimum la consommation des plus riches doit décroître. Mais comme le souligne Philippe Pelletier, ils oublient souvent de remettre en cause le capitalisme et se limitent à réguler certains de ses excès, tel le productivisme. C’est pourquoi Philippe Pelletier semble donc bien être un anti-capitaliste, qui défend un écologie libertaire pro-croissance et en tout cas pas un décroissant, ni un antiproductiviste.
Les partisans de l’antiproductivisme s’avèrent généralement proche des idées de la décroissance, du refus du progrès pour le progrès. Ils critiquent l’usage systématique de la technique et le culte de la productivité. La plus grande différenciation entre les courants des politiques économiques relève de l’opposition liberté contre égalité, droite contre gauche, capitalisme contre anti-capitalisme. Il y a donc ce type de clivages entre antiproductivistes, comme entre écologistes. C’est pourquoi il existe plusieurs antiproductivistes, comme il y a plusieurs productivismes et plusieurs écologismes, des anti-productivismes de gauche et des anti-productivismes de droite et d’extrème droite. Ne pas les différencier engendre un confusionnisme volontaire ou involontaire.

Notes :

1) PELLETIER Philippe « La critique du productivisme », Editions Noir et Rouge, 2016.

2)  FRANCOIS Stéphane, « Qu’est ce que la Révolution Conservatrice ? », Temps Présent, août 2009.

Publicité
Commentaires
Archives
Publicité
Publicité